L'EVALUATION D'ENTREPRISE : UN ETERNEL DEBAT !
Pour évaluer un prix de vente, il existe de nombreuses méthodes d’estimation d’entreprise qui conduisent souvent à des résultats très disparates, parfois même du simple au quintuple, voir plus ! C’est assez déroutant pour qui veut estimer une affaire de façon lucide. Il existe pourtant une approche fiable et qui ne trompe presque jamais : celle du banquier !
Souvent ignoré, c’est pourtant lui qui tranche à la fin et qui permet de concrétiser la transmission. Et son point de vue est simple : Prêter pour assurer un remboursement sans turbulence ! Dès lors, qu’il s’agisse d’évaluer un fonds de commerce ou une société, la clé de voute est toujours la même : la capacité de remboursement de l’entreprise.
Pour vous cédant ou repreneur, afin de fonder votre projet sur des bases réalistes, il convient de solliciter un professionnel d’expérience pour réaliser cet exercice. Notez bien que l’évaluation d’entreprise est un métier ! Cependant, par souci d’information et de transparence, nous vous proposons d’en découvrir ici les lignes directrices.
Les grands principes de l’évaluation d’entreprise
La base de travail est le dernier bilan complet de l’entreprise. Il indique normalement la comptabilité pour les deux dernières années, avec chacune une durée de 12 mois. Si une année d’exercice présente une durée différente, 9 ou 15 mois par exemple, il faudra ramener les chiffres de la colonne au prorata temporis de 12 mois.
Consultez d’abord la page des Soldes Intermédiaires de Gestion, afin d’y relever le chiffre d’affaires, la marge commerciale et d’apprécier la rentabilité générale. Chaque métier a ses propres normes. Par exemple, pour un restaurant traditionnel, la marge brute standard est d’environ 70% du chiffre d’affaires HT. Mais ce taux diffère selon que vous étudiez un tabac presse, une pizzeria, un garage auto, une boulangerie ou un hôtel …
Regardez ensuite l’Excédent Brut d’Exploitation – l’EBE. Ce chiffre est très important car c’est l’un des principaux révélateurs de rentabilité d’une entreprise. Il peut aussi être amendé car il dépend directement des charges de fonctionnement. Ces charges varient d’une année sur l’autre et elles varieront de nouveau quand un repreneur prendra possession de l’entreprise. C’est précisément à ce stade où s’effectue un travail que l’on appelle le retraitement, qu’un regard professionnel est nécessaire.
Cas pratique
Pour mieux comprendre, consultez la page d’un compte de résultat détaillé. Dans ce tableau, vous trouverez la composition du chiffre d’affaires et de toutes les dépenses de fonctionnement. Il convient de relever d’une année sur l’autre les grandes variations de chiffres pour lesquelles il faut produire des explications.
De surcroît, chacun de ces chiffres, et notamment les charges de fonctionnement, peut faire l’objet d’une baisse ou d’une augmentation après la vente : Le loyer, les frais de déplacement, les honoraires de conseil, l’effectif, la rémunération de l’exploitant et ses incidences sur les cotisations sociales … etc.
L’éventuelle variation de chacune de ces dépenses va impacter à la hausse ou à la baisse l’Excédent Brut d’Exploitation. Par exemple, si on prévoit une économie de 100 sur les frais de véhicule, l’EBE retraité augmente de 100, et inversement.
Vous obtenez alors un résultat que l’on peut nommer l’Excédent Brut d’Exploitation retraité. C’est en quelque sorte les profits que doit générer l’exploitation de l’entreprise après le départ du cédant. Il est parfois pertinent de faire la moyenne des EBE sur les trois dernières années pour affiner l’estimation.
Dès lors, pour évaluer un fonds de commerce, on applique des coefficients qui dépendent beaucoup de l’état de santé général de l’entreprise, de la stabilité des bilans et de la rentabilité, ainsi que des éventuels investissements à prévoir immédiatement après la vente : véhicules, travaux, machines-outils … etc. Moins il y a d’investissement à anticiper, plus le prix de vente est bonifié et inversement. La conjoncture économique du moment influe également sur le coefficient.
D’autres facteurs non-financiers agissent sur l’estimation comme par exemple la diversité du portefeuille client, leur fidélité, la notoriété de l’entreprise, la fidélité du personnel ou l’évolution générale du marché.
Sur la base de cette rentabilité retraitée, pour convaincre le banquier de financer une reprise d’entreprise, il faut présenter un prix de cession supposant une tension de remboursement raisonnable. Ce seuil de tension respecte des usages qu’il faut manier avec savoir-faire. Il convient de notamment préserver des marges de manœuvre pour d’autres investissements : imprévus, renfort de trésorerie, recrutement, développement de l’activité, renouvellement de matériels et d’aménagements … etc.
En cas d’évaluation de société, on tiendra compte de la capacité d’auto-financement mais on portera également une attention toute particulière au contenu de l’actif et du passif du bilan. En effet, en cas d’achat de société, on acquiert aussi les dettes et la trésorerie de l’entreprise !
Les cas particuliers
Le premier est celui où le prix de vente du fonds est très surestimé parce que l’entreprise présente un fort potentiel de croissance. Le banquier se mue alors en un avocat pointilleux et pose deux questions :
1. Le potentiel a-t-il déjà été réalisé par le cédant et si oui, comment ?
2. En achetant le potentiel, le repreneur achète-t-il autre chose que son propre travail ?
Si les réponses sont satisfaisantes, le banquier peut entendre qu’il y a un potentiel, le cas échéant, il en reste à la méthode précédente.
Le second cas se rapporte à une entreprise qui n'est pas structurellement rentable mais dont certains éléments du fonds peuvent quand même lui donner de la valeur. Notamment s’il y a un pas de porte, un emplacement n°1, un excellent fichier clients, des aménagements très récents, ou des matériels onéreux qui ont une sorte de côte argus ! Dans ces circonstances, le prix du fonds est au moins égal au prix de ces éléments.
Un bon conseil : Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement !
Dans tous les cas de figures, lorsqu’il réalise une estimation vous reconnaitrez un bon professionnel lorsqu’il est capable de vous expliquer en détail le prix qu’il obtient ! Il doit vous le livrer en termes simples et compréhensibles. Si les explications vous semblent confuses ou manquer de bon sens, passez votre chemin et demandez un autre avis.